Service d’Accompagnement à la Vie Sociale de l’AMIPH

“La pensée critique, c’est quoi ?” – Jonathan DIRIES

Il y a des années, je me suis posé une question : est-ce qu’il est possible d’avoir toujours raison ? D’avoir des arguments infaillibles et de trouver la vérité dans toute les situations et à tout problème ? Spoiler : non. Alors qu’est-ce que l’esprit critique, qu’on entend appelé parfois « esprit cartésien », rationalité, scepticisme scientifique ou zététique comme j’ai pu souvent le voir ? Il s’agit de méthodes, de réflexes de pensée, d’une boite à outils, incomplète certes, mais le charme est de l’agrandir le panel d’outil et de les améliorer, qui essaie (faut bien commencer par essayer) de trouver au moins une part de réalité car il y en a bien eu une à un évènement, une information, une situation… Si tu bois un thé et que tu entends une vitre se briser dans la pièce à côté, le ballon de basket et le verre brisé te donnent des indices forts. Tu pourras reconstituer les évènements qui ont conduits à la fenêtre cassée, plutôt qu’imaginer que le ballon est entrée après que quelque chose ait brisé la fenêtre, puisqu’il n’y a pas d’autre chose. En regardant par la fenêtre, donnant sur le jardin, tu pourras soupçonner la personne, disons Roberta, qui se tient là comme un piquet. Il n’y aura pas de raison de soupçonner un fantôme, une personne dans la rue qui n’est pas dans l’angle de toute façon, ni un ballon tombé par une incroyable chance de la soute d’un avion quand il n’y a pas d’avion dans le ciel. L’esprit critique, c’est comme une enquête. Mais évidement, portée sur des discours politiques, sur des faits divers commentés par le tout venant, sur une image violente qui choque et fait le buzz, sur tout support de l’information et tout type d’information, la question devient autrement plus longue et plus compliquée à traiter. Mais elle devient cruciale en démocratie, pour sa santé ou éviter d’être enrôlé dans la haine ou une opinion, croyance qu’on n’aurait pas acceptée en temps normal, ou simplement éviter de se faire arnaquer ou intoxiquer (fake news). Je disais plus tôt qu’il n’y a pas de méthode magique de retrouver la vérité, mais pire, on est faillible ! Car tu as déjà accusé Roberta, alors que Roberto était caché au pied du mur et c’est lui le coupable… Il y a de nombreux biais, des éléments qui viennent perturber le traitement de l’information par toute personne, même toi : lecteur/lectrice. Certains sont dus à des réflexes naturels et anciens de la pensée humaine, une façon de gérer le trop plein ou le manque d’informations. Les biais sont inévitables, mais en avoir conscience, permet sinon d’éviter de faire des erreurs, au moins de les comprendre et d’apprendre.

Par exemple dans le tri des informations : le biais de confirmation intervient quand une information nous plaît, on la pense vraie sans vérifier. La validation subjective décrit que lorsqu’une information fait écho à sa vie personnelle, on la considère comme plus vraie.

Dans la recherche de sens : la paréidolie désigne le fait de trouver des formes ou sons dans du bazar, du chaos ou du bruit (comme voir des visages dans une prise électrique). L’essentialisme concerne la croyance que les gens ont une essence « ils sont comme ça parce que », il est nécessaire de préciser que ce mode de pensée a donné naissance aux discriminations (le racisme, le sexisme, l’homophobie,…) jusqu’à des guerres. La croyance au monde juste est la croyance que le monde est dans un parfait équilibre moral et que l’on mérite ce qui nous arrive, quoiqu’il arrive, en bien comme en mal. Le biais du survivant où l’on se concentre sur de rares éléments qui ont réussi un test, plutôt que sur des statistiques, plus représentatives. L’illusion de transparence est le fait de penser que les autres nous cernent facilement, favorisant le trac au théâtre notamment.
Dans la prise de décision et l’action : l’effet Barnum naît d’une description pourtant vague à laquelle on se sent correspondre. L’escalade d’engagement décrit une personne (ou un groupe) qui s’enfonce dans un choix initial même s’il va jusqu’à l’échec. L’erreur fondamentale d’attribution désigne le réflexe de donner une importance exagérée à des éléments personnalisant (intention, opinion, caractère) plutôt que des éléments de situation (faits) dans la réception d’un comportement ou d’un discours.
Dans la mémoire : le faux souvenir désigne le fait de se souvenir de ce qui n’a jamais eu lieu (le monsieur Monopoly n’a pas de monocle ;)). Le biais de récence décrit que l’on accorde plus d’importance à ce qui est récent que passé, indépendamment d’une importance réelle et que tu as probablement plus retenu la fin de cette liste que le début…